Feldkirch - Dynamo Moscou (25 janvier 1998)

 

Finale de l'EHL (European Hockey League).

Après avoir éliminé le champion tchèque Vsetín en demi-finale, le club autrichien de Feldkirch peut-il enchaîner un nouvel exploit ? Son principal atout est de pouvoir jouer cette finale à domicile dans une patinoire évidemment pleine devant des spectateurs enfiévrés qui chantent tout du long de la partie. Ce soutien pousse une équipe autrichienne tout de suite active au forechecking. Elle perturbe beaucoup les sorties de zone russes, que ce soit en pressant en fond de territoire ou en interceptant les palets à la ligne bleue.

Peut-être agacé par cette gêne inattendue, Sergei Petrenko commet la première faute, une obstruction sur Gerhard Puschnik. Le powerplay autrichien reste installé la majorité du temps, sauf quand Troshchinsky dégage, mais Gribko et Leonov se sacrifient pour bloquer les lancers. Un sacrifice utile. Dès son retour sur la glace, Petrenko reprend entre les cercles un centre de Mikhaïl Ivanov qui a remonté la glace avec un contrôle presque magnétique du palet (0-1). Feldkirch n'a même pas le temps de douter. 25 secondes plus tard, un lancer contré de Gauthier est dévié sur le côté gauche vers Thomas Rundqvist qui ne se pose pas de questions et exécute un tir du poignet fulgurant dans la lucarne proche (1-1).

Les Russes n'arrivent à profiter ni de leur supériorité technique individuelle, ni de l'avantage de jouer à 4 lignes contre 3. Le junior Chubarov, qui porte une grille, est bêtement pénalisé en zone offensive pour avoir levé sa crosse au menton de Gustafsson. La pénalité est sans conséquence, mais à 5 contre 5, le Dynamo ne paraît toujours pas serein. Un palet envoyé de manière anodine depuis la bande par Dominic Lavoie rebondit sur le poteau opposé, avant que le gardien Ildar Mukhometov ne repousse le palet dans un réflexe salvateur de la botte droite pour empêcher le but in extremis.

Mikhaïl Ivanov accroche Wheeldon dès le début de la deuxième période mais le Dynamo est toujours parfait en infériorité numérique. Zolotov puis Petrenko parviennent même à ressortir le palet pour envoyer en contre-attaque Aleksei Kalyuzhny, qui feinte le lancer et décale idéalement Aleksandr Yudin. La reprise du grand défenseur est repoussée par Reinhard Divis pour un arrêt décisif. Ivanov se venge en jouant bien le coup quand la crosse de Lavoie passe entre ses jambes, mais les Autrichiens savent eux aussi faire bloc et contrer les palets pour tuer une pénalité. C'est à 4 contre 4, après une altercation entre Troshchinsky et Puschnik, que les espaces s'ouvrent. Lev Berdichevsky centre pour Ivanov face au but, Divis s'interpose mais Berdichevsky vient exploiter facilement le rebond car il est seul face au gardien couché. Même si la seconde assistance qui lui est accordée est fantaisiste (comme les précédentes), le colosse Yudin a aidé ce but en venant entrecroiser sa trajectoire pour bloquer le défenseur danois Duus (1-2).

On a l'impression que le Dynamo est en train de prendre cette finale en mains... mais son jeune duo de quatrième ligne Chubarov-Afinogenov (18 ans chacun) est encore faible dans les duels et subit dans sa zone. Simon Wheeldon prend son propre rebond sur le côté gauche dans un angle fermé que Mukhometov ouvre par son plongeon (2-2). Les deux équipes se neutralisent alors pendant plusieurs minutes d'un âpre combat haché, jusqu'à un coup de coude de Kuvaldin en pleine tête que les arbitres ne laissent évidemment pas passer. Le powerplay de Feldkirch semble toujours stérile... mais il suffit d'une seule action ! La passe transversale de l'international slovène Tomaž Vnuk est parfaite pour la reprise directe de Daniel Gauthier (3-2).

Feldkirch n'est plus qu'à vingt minutes de l'exploit. Mais dès la deuxième minute de la troisième période, Duus ceinture Kuvaldin dans l'enclave. Le défenseur Michael Lampert joue un rôle-clé dans cette infériorité numérique avec une grosse activité pour gêner le porteur du palet, mais il finit par prendre un tir de la bleue en plein visage et sort avec la pomette ensanglantée (il joue sans visière). Les Autrichiens terminent à cinq défenseurs. Bengt-Åke Gustafsson gagne un engagement-clé à la reprise du jeu et Feldkirch garde ou dégage le palet pendant les cinquante dernières secondes de la pénalité, sous les cris de joie d'un public en liesse. Peu après, Grybko trébucher Rundqvist qui vient de le mette en échec dans la bande. Et ce sont les Autrichiens trouvent enfin l'ouverture en avantage numérique : Simon Wheeldon fait une passe diagonale pour le slap de la bleue de Patrik Aronsson masqué par Gustafsson et prend lui-même le rebond dans la cage grande ouverte (4-2).

Le Dynamo n'a plus de temps à perdre. Andrei Kuzmin déborde tout de suite sur l'aile gauche et se fait accrocher par Dominic Lavoie - souvent en difficulté en un contre un face aux attaquants russes. Autant le précédent powerplay n'avait rien donné, autant celui-ci dure... quatre secondes : Ivanov gagne le palet face à Gustafsson et Troshchinsky sert le long de la bleue Dmitri Ryabykin dont la reprise de volée passe sous le gant de Divis (4-3). Les Russes sont relancés et les duels deviennent plus intenses le long des bandes dans la zone autrichienne. Berdichevsky y prend une pénalité en laissant traîner la jambe pour un croc-en-jambe sur Rundqvist. Feldkirch utilise ces deux minutes pour gagner du temps : il n'en reste plus que dix.

À l'exception du but, les Russes n'ont pas eu d'occasion dans ce troisième tiers. Feldkirch joue très compact dans l'enclave et arrive à bloquer même les passes de derrière la cage. Les blancs s'agacent. Le capitaine moscovite Yuri Leonov arrive enfin à s'infiltrer jusqu'au but lors d'un engagement... et hurle envers l'arbitre qui arrête le jeu pour une cage déplacée (par un défenseur ayant perdu l'équilibre) : dix minutes de méconduite. L'entraîneur russe Zinetula Bilyaletdinov sort son gardien à plus de trois minutes de la fin, mais malgré la forte pression sur la cage locale, les Autrichiens tiennent bon. Thomas Rundqvist inscrit un dernier but en cage vide et la fête est alors totale.

Le titre de champion d'Europe était toujours revenu aux quatre grandes nations traditionnelles du hockey sur glace : ex-Tchécoslovaquie, URSS/Russie, puis - cette décennie depuis l'écroulement du bloc de l'Est - Suède et Finlande. À la faveur de l'arrêt Bosman et de la libéralisation du nombre d'étrangers, c'est aujourd'hui un club d'une petite ville d'Autriche, le VEU Feldkirch qui empoche les 100 000 francs suisses promis au vainqueur de cette deuxième édition de l'EHL. Le Dynamo perd de nouveau en finale, mais cette fois alors qu'il était favori et se pensait supérieur.

Marc Branchu (photos Vincent Guerrier)

Commentaires d'après-match (dans Hockey Magazine) :

Ralph Krueger (entraîneur de Feldkirch) : "Je rêve et c'est pourtant vrai. Nous sommes champions d'Europe ! Bien sûr, un bon entraîneur doit toujours croire en la victoire des siens, mais là, très franchement, au fond de moi-même, je ne pensais qu'à de belles prestations, mais certainement pas à la victoire dans ce Final Four qui rassemblait deux très gros clubs russes et la formation tchèque qui domine depuis plusieurs années son championnat, l'un des plus relevés d'Europe. En prenant l'avantage en fin de seconde période, toute l'équipe a cru en l'incroyable. Après, mes garçons n'ont rien lâché ! [...] Essentiellement, nous avons grossi, en poids et en taille, notre défense. Je sais que dans un proche avenir, il faudra rajeunir l'effectif car Gustafsson a atteint la quarantaine tandis que Rundqvist et Ganster s'en approchent. Mais avec cette saison 97-98, nous ne devrions pas manquer de munitions pour la suite."

Feldkirch - Dynamo Moscou 5-3 (1-1, 2-1, 2-1)
Dimanche 25 janvier 1998 à 19h00 à la Vorarlberghalle de Feldkirch. 6500 spectateurs.
Arbitre : Gerhard Müller (ALL) assisté de Johan Norrman (SUE) et Rudolf Lauff (SVK).
Pénalités : Feldkirch 12' (2', 4', 6'), Dynamo 26' (4', 6', 6'+10').

Évolution du score :
0-1 à 06'48" : Petrenko assisté d'Ivanov et Leonov
1-1 à 07'13" : Rundqvist assisté de Gauthier et Nasheim
1-2 à 30'10" : Berdichevsky assisté d'Ivanov et Yudin
2-2 à 32'24" : Wheeldon assisté de Lundell
3-2 à 39'03" : Gauthier assisté de Vnuk et Searle (sup. num.)
4-2 à 46'39" : Wheeldon assisté d'Aronsson et Gustafsson (sup. num.)
4-3 à 47'33" : Ryabykin assisté de Troshchinsky et Ivanov (sup. num.)
5-3 à 59'58" : Rundqvist assisté de Searle (cage vide)
en noir, la feuille de match officielle ; en rouge, les corrections de Hockey Archives
 

VEU Feldkirch

Attaquants :
11 Simon Wheeldon (+2) - 14 Bengt-Åke Gustafsson (A, +1) - 12 Gerhard Puschnik (2')
16 Rick Nasheim (+1) - 9 Thomas Rundqvist (A, +2) - 21 Daniel Gauthier (4')
15 Fritz Ganster (C) - 24 Tomaž Vnuk (-1) - 17 Nik Zupančič (-1)

Défenseurs :
20 Patrik Aronsson - 26 Dominic Lavoie (-1, 4')
4 Tom Searle (+1) - 32 Michael Lampert (+1) [blessé à 42'57"]
96 Per Lundell - 3 Jesper Duus (2')

Gardien :
38 Reinhard Divis

Remplaçants : 33 Bruno Campese (G), 77 Wolfgang Strauss, 27 Bernd Schmidle, 7 Thomas Sticha.

Dynamo Moscou

Attaquants :
33 Lev Berdichevsky (-1, 2') - 30 Valery Chyorny - 10 Mikhaïl Ivanov (+2, 2')
14 Aleksandr Kharitonov (-1) - 12 Aleksandr Kuvaldin (2') - 9 Sergei Petrenko (A, 2')
23 Yuri Leonov (C, +1, 10') - 17 Aleksei Kalyuzhny (-1) - 26 Andrei Kuzmin (-1)
13 Valeri Belov (-1) - 15 Artyom Chubarov (-1, 2') - 31 Maksim Afinogenov (-1)
puis 35 Denis Kartsev à 40'00"

Défenseurs :
16 Dmitri Ryabykin (-1 -2) - 8 Aleksei Troshchinsky (-2, 2')
4 Roman Zolotov - 3 Aleksandr Yudin (+1 +2, 2')
2 Evgeni Gribko (A, -1, 2') - 34 Vitali Proshkin (+1)
18 Sergei Kozurov

Gardien :
29 Ildar Mukhometov [sorti de 56'52" à 59'58"]

Remplaçant : 20 Sergei Podpuzko (G).

 

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