Suède - Tchécoslovaquie (29 avril 1989)
Championnats du monde, poule finale, deuxième journée.
Le courage tchécoslovaque gâche la dernière sortie de Salming
Pour les perdants de la première journée, rien n'est encore perdu. Mais l'équipe qui concèdera une nouvelle défaite dira adieu à la course au titre et sera en fâcheuse posture pour l'accès au podium. La Suède veut éviter une telle déconvenue devant son public qui la soutient tellement. Elle verrouille bien sa ligne bleue, souvent avec quatre hommes, et trouve des intervalles. Tomas Sandström sert ainsi Johan Strömwall, dont le tir est suivi au rebond par Sandström lui-même, mais Dominik Hašek est à la parade. Les coéquipiers de Vladimír Růžička entrent vraiment dans le match après six minutes en tuant une pénalité de Jerguš Bača, qui a très joliment visé le palet de la crosse de Kent Nilsson mais qui a quand même été sanctionné pour avoir fait trébucher l'attaquant suédois au passage. À la dixième minute, le défenseur František Procházka se lance dans un joli débordement et Börje Salming le fauche en plongeant dans ses jambes pour l'empêcher de repiquer à la cage. Pendant l'infériorité numérique qui suit, Sandström parvient à voler le palet et à partir seul au but, mais son revers rasant est bloqué par Hašek en grand écart.
La Suède semble sûre de son jeu mais le match bascule en 23 secondes à peine sur deux erreurs individuelles consécutives de ses défenseurs. Tommy Samuelsson n'arrive pas à canaliser une rondelle capricieuse qui reste sur la tranche, et sa passe le long de sa ligne bleue devient donc une offrande pour Oto Haščák. Le centre slovaque se saisit du palet et le laisse à Tomáš Jelínek qui décoche un tir du poignet à mi-distance en pleine lucarne. La mitaine de Peter Lindmark ne peut réagir à temps (0-1). Une sortie de zone du revers de Salming est ensuite interceptée par Růžička qui décale Vladimír Svitek. Son lancer de la ligne bleue termine sa course dans l'autre lucarne en passant par-dessus le réflexe de l'épaule de "Pekka" Lindmark (0-2). La Suède accuse le coup et subit tous les duels jusqu'à la pause.
La Tre Kronor revient avec un élan nouveau en deuxième période en maintenant le jeu en zone offensive dès la première présence. Jiří Kučera se procure néanmoins encore une contre-attaque dangereuse : il se joue de Samuelsson en un contre un et tire entre les jambes de Lindmark qui doit se retourner pour sauver le palet derrière son dos. Derrière une équipe obligée de découvrir ses arrières, le gardien suédois se réhabilite progressivement par plusieurs arrêts face à Doležal sur centre de Haščák ou face à Růžička servi en 2 contre 1 par Šejba. Pour autant, il ne peut pas rivaliser avec le meilleur gardien de ce championnat Dominik Hašek, toujours vif y compris de la crosse pour intervenir dès que possible. Le gardien de Pardubice bénéficie aussi du travail de ses défenseurs qui font tous un très bon match avec beaucoup d'engagement.
La Suède, sans autre solution, a recours à un joker caché dans sa manche : alors que les Tchécoslovaques sont déjà à un homme de moins à cause d'un retard de jeu, et pendant que le toujours explosif Hašek reproche à l'arbitre d'avoir sifflé trop vite avant qu'il ne relâche un palet, le capitaine scandinave Anders Eldebrink émet une demande plus incongrue mais tout à fait réglementaire, faire vérifier la crosse de son homologue tchèque Růžička. Les arbitres procèdent à la mesure au vu et au su de tous... et ils infligent deux minutes de pénalité pour équipement illégal ! La Tre Kronor joue alors à 5 contre 3 pendant 1'06". Pendant cette phase-clé, Stavjaňa contre debout le seul lancer d'Eldebrink et Ščerban dégage deux fois le palet hors de sa zone. La Tchécoslovaquie en sort encore renforcée.
La Suède dégage un certain sentiment d'impuissance même si elle continue de dominer la possession au troisième tiers-temps. Mais soudain, Dominik Hašek, masqué par Håkan Södergren, se fait surprendre par un tir du poignet lointain mais soudain de Thomas Rundqvist qui ricoche sur le poteau puis dans le dos du gardien (1-2). Il reste alors onze minutes à jouer, amplement le temps de changer le cours de la partie.
La Tre Kronor semble quand même à la merci de la moindre erreur. Tommy Samuelsson, décidément en grande difficulté aujourd'hui, "donne" de nouveau le palet à Oto Haščák qui part seul au but et tire à deux mètres de distance... mais Lindmark capte le palet dans sa mitaine ! Le gardien suédois, sans cesse meilleur au fil du match, arrête aussi de la botte droite un breakaway de Svitek à l'avant-dernière minute. Růžička et ses collègues défendent avec un acharnement héroïque, mais Drahomír Kadlec charge Sandström avec la crosse pour récupérer le palet à 59 secondes de la fin. La pénalité sifflée permet à Tommy Sandlin de prendre son temps mort et de sortir son gardien pour finir la partie à 6 contre 4. Hašek ferme les bottes sur le lancer de la ligne bleue d'Eldebrink, ses défenseurs Ščerban et Stavjaňa se couchent devant les autres tirs, tandis que Haščák et Doležal interceptent les derniers palets : cette dernière minute illustre l'effort collectif manifeste des Tchécoslovaques, qui ont mérité leur victoire.
La grande fête du hockey que ces championnats du monde ont clairement été pour toute la Suède pendant deux semaines pourrait donc se conclure sans la moindre médaille pour les champions du monde en titre. Il est cruel que ce soit la légende Börje Salming qui ait perdu le palet sur le but décisif, dans ce tournoi qui sera certainement sa dernière apparition en équipe nationale et son ultime prestation devant un public suédois. Mais la Tre Kronor plus expérimentée a été dépassée en envie par la Tchécoslovaquie.
Étoiles Hockey Archives : *** Vladimír Růžička / ** Tomas Sandström et Antonín Stavjaňa / * Dominik Hašek et Oto Haščák
Marc Branchu
Commentaires d'après-match :
Stanislav Neveselý (entraîneur-adjoint de la Tchécoslovaquie) : "C'était un match-clé pour les deux camps. Nous avons essayé de défendre et d'éliminer la pression présumée de nos adversaires. Je pense que nous l'avons bien fait, sauf au début du dernier tiers."
Tommy Sandlin (entraîneur de la Suède) : "Bien sûr, nous voulions gagner, mais nous n'avons pas été capables de convertir nos occasions. Nos adversaires nous ont littéralement gelés avec leurs deux buts rapides."
Suède - Tchécoslovaquie 1-2 (0-2, 0-0, 1-0)
Samedi 29 avril 1989 à 16h00 au Globen de Stockholm. 13 856 spectateurs.
Arbitrage de Willi Vögtlin (SUI) assisté de Mikhaïl Galinovsky (URS) et Bernhard Kunz (SUI).
Pénalités : Suède 2' (2', 0', 0'), Tchécoslovaquie 8' (2', 4', 2').
Tirs cadrés : Suède 26 (6, 11, 9), Tchécoslovaquie 24 (6, 9, 9).
Tirs non cadrés : Suède 13 (2, 8, 3), Tchécoslovaquie 11 (2, 4, 5).
Tirs bloqués : Suède 13 (6, 3, 4), Tchécoslovaquie 3 (0, 2, 1).
Engagements : Suède 41 (20, 7, 14), Tchécoslovaquie 26 (11, 8, 7).
Évolution du score :
0-1 à 13'37" : Jelínek assisté de Haščák
0-2 à 14'00" : Svitek assisté de Růžička et Cíger
1-2 à 48'53" : Rundqvist assisté de Bergqvist
en noir, la feuille de match officielle ; en rouge, les corrections de Hockey Archives
Suède
Attaquants :
22 Håkan Södergren - 9 Thomas Rundqvist (C) - 18 Jonas Bergqvist
10 Kent Nilsson - 25 Thomas Steen - 20 Bo Berglund
28 Tomas Sandström (-1) - 24 Anders Carlsson (-1) - 12 Johan Strömwall (-1) puis 29 Ulf Dahlén à 20'00"
Défenseurs :
19 Peter Andersson - 21 Börje Salming (2')
2 Anders Eldebrink (A) - 3 Tommy Albelin
7 Tommy Samuelsson (-1) - 4 Fredrik Olausson (-1)
Gardien :
1 Peter Lindmark [sorti à 59'01"]
Remplaçants : 35 Rolf Ridderwall (G), 5 Mats Kihlström, 11 Jens Öhling. Surnuméraires : 30 Peter Åslin (G), 27 Thomas Eriksson, 14 Peter Eriksson.
Tchécoslovaquie
Attaquants :
20 Zdeno Cíger (+1) - 17 Vladimír Růžička (C, +1, 2') - 28 Vladimír Svitek (+1)
22 Jiří Šejba - 19 Robert Kron (-1) - 12 Otakar Janecký
27 Rostislav Vlach (-1) - 14 Jiří Kučera - 21 Oldřich Válek (-1, 2')
15 Jiří Doležal (+1) - 26 Oto Haščák - 24 Tomáš Jelínek (+1)
Défenseurs :
7 Bedřich Ščerban (+1) - 16 Antonín Stavjaňa (A, +1)
18 Jerguš Bača (2') - 9 František Procházka
3 Leo Gudas - 5 Drahomír Kadlec (2')
Gardien :
2 Dominik Hašek
Remplaçant : 29 Jaromír Šindel (G). En réserve : 1 Petr Bříza (G), 4 František Kučera, 6 Jiří Látal.