Autriche 2023/24 : panorama
Le dernier championnat 2022/23 - Les présentations 2022, 2021, 2020, 2019, 2018, 2017, 2016, 2015, 2014, 2013, 2012, 2011, 2010, 2009, 2008, 2007, 2006, 2005, 2004, 2003 et 2002.
Le paysage médiatique autrichien subit un profond chambardement et un recul de la diversité de la presse. En raison d'un plan d'économies demandé aux médias publics, la suppression des annonces officielles de l'État dans le quotidien Wiener Zeitung (le plus vieux journal du monde publié depuis 1703) a entraîné la fin de son édition papier depuis juin. L'Autriche, qui était dans les 20 premiers, a nettement reculé au classement mondial de la liberté de la presse (31e).
Le sport a finalement échappé à ce sort. En février, le chef de la télévision publique ORF avait pourtant annoncé la suppression d'ici 2026 de la chaîne ORF Sport +. Pour la fédération autrichienne de hockey sur glace, c'était une catastrophe : 95% des heures de diffusion de l'équipe nationale passait par ce canal, qui représentait à lui seul 72% de sa valeur télévisuelle. Toutes les fédérations - y compris le football - avaient fait les mêmes calculs : sans présence médiatique à vendre aux sponsors, les pertes se chiffraient en millions d'euros. La mobilisation du monde sportif a eu un effet car le projet a été retiré un mois plus tard. ORF Sport Plus continuera tant qu'une solution équivalente n'est pas trouvée.
La ligue (ICE Hockey League), elle, utilise des canaux privés, mais elle a aussi entrepris une révolution : la création d'une plateforme de streaming pour toutes les rencontres. "Il s'agit de devenir plus moderne", selon son président Jochen Pildner-Steinburg. Cela n'a pas été sans résistance. Vienne et Klagenfurt ont longtemps refusé de laisser diffuser leurs matchs à domicile, un arbitrage juridique confirmant qu'on ne peut pas les y contraindre. La ligue a mené son projet à terme. Si un match par semaine reste diffusé sur une chaîne gratuite confidentielle dont le hockey est une tête de pont (Puls 24), toutes les autres rencontres sont disponibles par abonnement.
Ce sont les prix qui ont estomaqué les fans de hockey : 9,90€euros par match, 249 € pour suivre une équipe toute la saison (sans les playoffs !), 599 € pour la totalité du championnat ! Même réparti sur quatre pays, voilà le prix pour ce qui reste un petit marché, quand NHL TV est disponible pour moins de 100 dollars pour bien plus de matches. Les abonnements à des chaînes de télévision sportive qui ont plusieurs sports dans leur offre ne sont pas aussi chers.
La ligue a été plus rapide pour mettre en place ce "cher projet" que pour instituer le système d'indemnités pour les clubs formateurs qui était prévu dans le contrat de coopération signé en juin 2022 avec la fédération. Ce système baptisé AKES (Ausbildungs-Kosten-Ersatz-System) devait être activé cette saison, mais les groupes de travail sont toujours en cours pour le mettre au point en s'inspirant notamment des expériences de l'Allemagne et de la Suisse.
Accès direct à la présentation de chaque club : Salzbourg, Klagenfurt, Linz, Villach, Bolzano, Val Pusteria, Fehérvár AV19, Innsbruck, Pioneers (Feldkirch), Vienne, Asiago, Olimpija Ljubljana, Graz.
Salzbourg avait déjà tracé le plan de carrière de son entraîneur Matt McIlvane et le voyait succéder à terme à Don Jackson à Munich. Mais l'Américain de 37 ans était pressé et veut choisir le chemin le plus court vers la NHL. Il a donc fait savoir en février qu'il s'en irait à l'intersaison en direction de l'AHL. Ce qui peut sembler curieux, c'est que Ben Cooper, ancien assistant en NHL et chef à Herning, reste adjoint comme depuis deux ans (et deux titres). Le Red Bull a préféré recruter Oliver David, qui était pourtant lui-même assistant-coach chez le vice-champion suisse Bienne, sans grande expérience d'entraîneur-chef (sauf en USHL et par intérim pendant les absences d'Antti Törmänen pour sa chimiothérapie).
Les grandes annonces ont été rares à l'intersaison à Salzbourg : six départs (dont un Autrichien, Dominique Heinrich, qui n'a pas eu de nouvelle proposition de contrat et est rentré dans sa ville natale Vienne) pour seulement deux arrivées. Est-ce parce qu'une pléiade de jeunes joueurs locaux sort des infrastructures de formation ultra-modernes financées par Red Bull ? Pas vraiment. Damian Clara, le gardien italien, est le 12e joueur drafté en NHL qui en est issu... mais parmi eux on ne recense aucun Autrichien ! Luca Auer, pourtant très suivi des recruteurs en 2022, n'avait pas été choisi et plafonne depuis. Les responsables sportifs de Red Bull veulent donc recentrer l'académie sur les joueurs allemands et autrichiens pour alimenter principalement leurs deux clubs (Munich et Salzbourg).
Il n'empêche que ça peut suffire. Une des deux recrues est Ryan Murphy qui a 176 matches de NHL au compteur et arrive directement de KHL. C'est un renfort de haut niveau, il y a encore 4 étrangers en défense, et il y en aura sûrement encore 5 en play-offs avec un joker. Il est plus osé d'avoir abordé la saison avec seulement deux attaquants étrangers (Troy Bourke et la seule autre recrue de l'intersaison Adam Payerl qui sort d'une saison médiocre à Augsbourg), mais le très efficace Peter Schneider et l'éternel Thomas Raffl mènent une cohorte d'internationaux qui restent performants.
Même quand un virus a fortement affaibli l'équipe en octobre (le plus touché est Benjamin Nissner durablement absent), aucun renfort n'est arrivé. C'était trop tard pour la CHL, le champion d'Autriche y était déjà éliminé. C'était trop tôt pour le championnat ; aucune raison de s'affoler tant qu'on reste dans le peloton de tête, une stratégie qui a fonctionné l'an passé. Salzbourg reste favori en ICE HL parce qu'il a plus de moyens pour se renforcer en temps utile... et parce que ses concurrents se sont tous affaiblis.
On ne considère plus Klagenfurt comme un concurrent au portefeuille aussi ouvert depuis le décès de la veuve-mécène Horten. Le KAC a un effectif allégé puisqu'il a perdu trois de ses quatre meilleurs buteurs (Ticar, Lessio, Bukarts) et n'a engagé qu'un seul étranger cet été, Jan Mursak. Le Slovène de 35 ans a encore de beaux restes puisqu'il s'impose en meilleur marqueur de l'équipe, comme avant lui son compatriote Rok Ticar (qui l'est toujours pour sa part mais sous les couleurs de Vienne).
L'autre changement de l'effectif - la retraite de Thomas Koch - a bien été anticipée. Le retour de Raphael Herburger était la solution la plus évidente. Depuis 15 ans, il a gardé sa résidence à Klagenfurt, même quand il est parti jouer en Suisse. Le KAC est toujours resté en contact avec lui et a cette fois trouvé un accord, maintenant qu'il a 34 ans, dix ans après son départ. Deux fois champion dans sa jeunesse, Herburger n'a jamais obtenu de titre ailleurs, même pas pendant quatre années à Salzbourg qui les collectionne pourtant.
Une page s'est tournée sur le banc avec le départ du coach Petri Matikainen, qui a obtenu deux titres en cinq ans à Klagenfurt. Une solution interne a été choisie avec Kirk Furey, qui entraînait pendant ces cinq années l'équipe-ferme d'Alps HL. Ancien joueur de l'équipe de 2007 à 2015, Furey passe logiquement pour un coach proche de son vestiaire, bien moins autoritaire qu'un Matikainen. Il professe surtout un autre style de jeu : son objectif est de mettre beaucoup de pression sur l'adversaire pour provoquer des revirements aussi tôt et aussi rapides que possible. Ce pourrait toutefois être moins confortable pour le gardien Sebastian Dahm que la tactique défensive de l'entraîneur finlandais.
Lorsque Dahm s'est blessé, sa doublure Florian Vorauer a soudain pris la lumière en jouant plus que prévu. Le jeune gardien de 21 ans a joué 10 matches, il a récolté beaucoup de compliments, et a été au passage appelé en équipe nationale. Néanmoins le KAC a fini par recruter un autre portier étranger, Christian Engstrand, qui a fait un très bon intérim. Interrogé pour savoir si cela ne traduisait pas un manque de confiance, l'ex-gardien Reinhard Divis a retourné la question dans une interview sans concession à Laola1 en faisant valoir que le pourcentage d'arrêts de Vorauer (88,8%) aurait été jugé insuffisant pour un titulaire et qu'il n'y a pas de raison d'évaluer un jeune différemment d'un autre. Il a ajouté que, de son temps, on ne se cherchait pas d'excuses... Selon lui, le problème des gardiens autrichiens vient d'un défaut de formation à la base (ce n'est pas le cas chez les pros de Klagfenfurt car l'entraîneur des gardiens Andrej Hocevar travaille patiemment à la progression de Vorauer) et pas d'un manque de courage des entraîneurs, qui alignent leur meilleur spécialiste. Mais quelle que soient les causes profondes, une chose est sûre : si l'Autriche s'est si vite emballée en quelques semaines sur le cas Vorauer, c'est parce que le poste de gardien donne des sueurs froides à tout un pays après la retraite de Starkbaum.
Après deux années de crise de légitimité (les dirigeants étaient contestés tant par les supporters que par les partenaires), Linz a retrouvé en même temps la sérénité en coulisses et des résultats plus adéquats sur la glace. Après une septième place correcte, l'aventure s'est seulement achevée en prolongation du match 7 du quart de finale contre le futur finaliste Bolzano. C'était donc une étape satisfaisante avant un retour dans le haut du tableau. Les Black Wings sont redevenus crédibles, et ils ont attiré cet été Nico Feldner, un des rares Autrichiens combinant le gabarit et le talent offensif.
L'entraîneur et directeur sportif Philipp Lukas a parfaitement réussi à redonner confiance à tout un club. Pour sa seconde saison, il fait encore mieux puisqu'il a carrément mis sur pied la meilleure défense de la ligue. Déjà l'an passé, son système de jeu laissait peu d'espaces à l'adversaire. Individuellement, les lignes arrières se sont améliorées. L'Américain Logan Roe, qui y était un peu seul, a été rejoint par de meilleurs étrangers, un Matt McKenzie solide dans les deux sens de la glace et un Martin Stajnoch expérimenté. Le jeune Niklas Würschl est par ailleurs venu remplacer le retraité Martin Schumnig.
À l'attaque, la deuxième ligne théorique Emil Romig - Graham Knott - Shawn St-Amant s'est trouvée la saison dernière et est désormais clairement la plus forte. Le départ du centre norvégien et meilleur marqueur Michael Haga inquiétait, son remplaçant Sean Collins est un profil plus physique mais moins créateur. Il n'est pas aussi dominant mais Brian Lebler plante toujours autant, au point d'être devenu le meilleur buteur de l'histoire de la ligue. En confiance sur toutes ses lignes, Linz se permet même de n'utiliser que 8 étrangers sur un quota de 10, un nombre qui n'a pas augmenté après la grave blessure le 24 septembre de Stefan Gaffal, qui servait de joueur de complément sur le top-6 la saison dernière. Frappé au visage par un palet, l'attaquant autrichien a subi une fracture du crâne et a gardé de ce moment un souvenir effrayant : "J'étais comme enfermé dans mon corps et j'ai pensé que je m'étais brisé le crâne et que j'allais mourir sur place. J'ai crié comme si on m'écorchait vif."
La section hockey sur glace de Villach a été fondée en 1923 et est désormais centenaire. Les mauvaises langues pourraient ajouter que ces 100 ans du club correspondent à l'âge cumulé de ses deux gardiens ! Le VSV s'appuie en effet toujours sur l'éternel Jean-Philippe Lamoureux, qui à 39 ans prend très rarement des pauses pour laisser jouer sa doublure de 35 ans René Swette.
De manière générale, l'entraîneur canadien Rob Daum fait fi de l'âge. Il considère que ses vétérans étrangers sont toujours en bonne condition physique et n'auront pas de mal à suivre le rythme. Ce n'est donc pas grave pour lui si les trois attaquants-clés Robert Sabolic, John Hughes et Andrew Desjardins ont tous 35 ans ou plus. L'attaque devait donc rester telle quelle... sauf que Chris Collins a utilisé sa clause de sortie pour rejoindre la DEL et Augsbourg. Il s'agissait du centre numéro 1 qui donnait le tempo offensif. Son remplaçant Kevin Hancock, performant il y a deux ans dans la petite équipe de Dornbirn, le serait-il dans un plus grand club ? Hancock a vite balayé les doutes car il a parfaitement remplacé Collins et réussit lui aussi à évoluer au-dessus d'un point par match, en plus d'amener un peu de jeunesse bienvenue (il a 25 ans).
La priorité de Rob Daum était de s'améliorer défensivement et il y considère y être parvenu. Un seul défenseur étranger est resté, le vétéran letton Arturs Kulda. Le super défenseur offensif Nicolas Mattinen est parti à Straubing en DEL où il est tout aussi productif. Mais les lignes arrières sont meilleures en transition avec les expérimentés Mark Katic et Alex Wall tandis que le jeune Dylan MacPherson - capitaine dans deux équipes d'ECHL - est efficace et propre dans les deux sens de la glace. L'effectif de Villach prouve aux sceptiques qu'on peut réussir en Autriche sans insister sur l'intimidation physique, qui joue souvent un grand rôle dans ce championnat.
Premier de saison régulière, battu au septième match de la finale, Bolzano pouvait se targuer d'un bilan presque parfait. Mais le HCB n'arrive décidément jamais à bâtir dessus quand il réussit une grande saison. Ce fut l'abattement début août dans la capitale du Haut-Adige quand on annonça que Glen Hanlon ne reviendrait pas. L'entraîneur canadien de 66 ans voulait rester auprès de sa femme directrice d'école, retenue au moins jusqu'à fin octobre. L'ambiance resta morose pendant une pré-saison décevante qui s'acheva par quatre défaites en CHL. Les joueurs paraissaient avoir les jambes très lourdes, alors que le système du nouveau coach Niklas Sundblad repose sur un fort tempo.
Le directeur sportif Dieter Knoll détourna alors l'attention du coach et prit la responsabilité sur lui dans une interview accordée à sportsnews le 13 septembre, juste avant la première journée de championnat : "La fatigue des joueurs n'est imputable qu'en partie qu'à l'entraînement intensif, et bien plus au programme tendu de tests. J'ai essayé de contenter tous nos partenaires qui nous demandaient un match contre le HC Bolzano. En plus des parties de CHL nous sommes arrivés à 12 matches en moins de quatre semaines - c'est bien trop. C'est ma faute. [...] Toutes les rumeurs sur l'entraîneur sont des foutaises absolues ! Ce n'est pas vrai que nous gardons Glen Hanlon en réserve. Je n'ai aucun contact avec lui. La volonté est de passer toute la saison avec Niklas Sundblad, c'est certain. J'ai parlé avec les joueurs, ils sont derrière leur entraîneur."
Six jours après ce démenti très fort, le 19 septembre, Sundblad se faisait virer. Six jours encore plus tard, le 25, Hanlon était annoncé comme son successeur (il arriva la semaine suivante et n'avait plus que quelques semaines à passer à attendre son épouse). Cette pièce en trois actes est dans le registre habituel du Bolzano du Docteur K (le surnom de Knoll), jamais avare en coups de théâtre.
Glen Hanlon a immédiatement annoncé le retour à ses principes de base : "Les attaquants peuvent gagner des matches, mais la défense gagne des championnats. Je veux une équipe qui joue de façon structurée." Tant pis pour ceux qui n'entrent pas dans son concept. La recrue de 30 ans Lucas Lessio (qui restait sur une saison à 36 points à Klagenfurt) n'a mis qu'un but en 14 matches et a fini par se retrouver en tribune comme étranger surnuméraire. L'ancien choix de deuxième tour de draft des Coyotes a été renvoyé mi-novembre vers Krefeld (DEL2) où il avait laissé le souvenir d'un buteur. Hanlon a clairement repris la main (qu'il n'a pas perdue très longtemps), et Bolzano redevient sans doute un concurrent aussi sérieux que l'an passé.
L'objectif de prendre la suprématie régionale à Bolzano a été clairement raté pour Val Pusteria (Pustertal en allemand), le club de Brunico. La saison a été un échec (onzième) alors que le concurrent a brillé. La rivalité historique n'a pas empêché une collaboration. Une nouvelle Alps Ice Academy, pour des joueurs à partir de 14 ans, a été installée à Brunico. Il s'agit d'un projet commun des 10 clubs du Tyrol du Sud (dont Bolzano) pour former sur place des joueurs qui prenaient parfois la direction de l'académie de Salzbourg, ou de l'Allemagne. Il a pour objectif de créer 80 places en internat d'ici cinq ans, avec un cursus scolaire adapté.
Pour autant, la rivalité existe toujours en senior. Un seul étranger a été conservé, Wyatt Ege (sans doute le moins cher), neuf nouveaux sont arrivés. C'est une belle équipe qui a été assemblée, au point qu'on les souvent cité Pustertal comme ayant réussi le meilleur recrutement. Ce fut encore plus vrai quand ils ont démarré en tête, avant de caler notamment par les blessures. La recrue-phare Jason Akeson, meilleur marqueur de DEL en 2020/21 (avec Cologne) et 2021/22 (avec Straubing), est un pur marqueur, surtout en jeu placé et donc en powerplay, même si l'ailier de 33 ans n'est pas le patineur le plus endurant ni le plus dévoué défensivement.
Les loups jouent avec une forte intensité et finissent leurs charges avec un jeu très canadien, ce qui n'est pas étonnant car aux imports se sont ajoutés des Italo-Canadiens réputés dans la ligue comme Alex Petan. Pour parvenir à ce nouvel équilibre, ils ont sacrifié l'habituel gardien numéro 1 étranger (Sholl). Andreas Bernard, ancien gardien de Liiga à la carrière déclinante, a été embauché pour former un duo avec l'Italo-Canadien Jake Smith. Il n'est pas impossible qu'on retrouve les deux clubs italiens dans le top-6, qui qualifie directement en quart de finale. Ce serait inédit.
L'entraîneur Kevin Constantine, qui avait signé pour 3 ans en 2021 et venait de conduire Fehérvár à sa meilleure saison dans la ligue, s'est désisté pour "raisons personnelles" en juillet et s'est engagé avec une équipe junior américaine de WHL (Wenatchee). Le directeur du club Viktor Szelig a accusé le coup : "Il a pris cette décision indépendamment de nous. Nous acceptons sa décision, et ses motifs peuvent être compréhensibles d'un point de vue humain, mais c'est décevant pour moi. Nous lui avons accordé un contrat de trois ans pour suivre sa volonté, et il sort maintenant à un moment qui n'aurait pas pu être plus malheureux. Je ne me serais pas imaginé que la fin d'une relation amicale se passerait ainsi."
Assistant-coach depuis trois ans, Dávid Kiss le remplace. Il est à 33 ans le jeune coach de l'histoire du club, mais aussi le premier Hongrois à entraîner en ICE HL. Il connaît très bien une organisation où il travaille depuis douze ans (dans le hockey mineur à l'origine). Dans les trois mois qui ont suivi cette nomination, le karma a rattrapé Constantine, suspendu et renvoyé pour propos racistes. Depuis lors, Constantine est devenu entraîneur "officieux" du club roumain de Miercurea Ciuc, sans avoir le droit d'apparaître sur le banc. Pendant ce temps-là, tout va bien pour Fehervár et son nouveau coach : c'est l'équipe-surprise du début de saison.
Ce n'était pas évident car le club hongrois avait perdu non seulement son meilleur marqueur Alex Petan (Pustertal) mais aussi trois joueurs hongrois pas faciles à remplacer, le défenseur Milan Horváth (dont le départ à Briançon fut inattendu) et les attaquants Andrew Sarauer (retraite) et surtout Csanad Erdely (Esbjerg).
L'attaque de Fehervár est performante, emmenée par Guillaume Leclerc, arrivé en décembre dernier, et par le capitaine Janos Hari, qui a retrouvé son niveau habituel à plus d'un point par match après le déclin passager de la saison passée. Le Français et le Hongrois sont certainement deux des attaquants les plus talentueux de la ligue. Défensivement, la surprise est venue de Dominik Horváth qui est en train de supplanter le vétéran canadien Olivier Roy de son poste de numéro 1 dans les cages. Un gardien de 22 ans qui s'impose comme titulaire en ICE HL et représente l'avenir de son équipe nationale : ce n'est pas que les Autrichiens seraient jaloux, mais...
Personne ne se serait attendu que ce soit le HC Innsbruck - qualifié par sa troisième place en saison régulière même s'il avait ensuite perdu en demi-finale - qui soit le seul qualifié de la ligue autrichienne pour les huitièmes de finale de CHL, où les Tyroliens ont poussé les Finlandais de Lukko en prolongation à la fin de l'aller-retour. Dès les premières rencontres européennes, le nouveau gardien Evan Buitenhuis a été adopté par le public. Sans être un puriste de la technique, il est très agressif et athlétique dans ses réflexes. La seule question est de savoir s'il pourra maintenir cette performance, a fortiori avec le cumul des compétitions : le Canadien est habitué à partager la cage en ECHL mais doit apprendre à jouer de manière quasi-permanente avec une doublure sans la moindre expérience.
La profondeur de banc d'Innsbruck est en effet toujours aussi faible. Après le départ de Feldner à Linz, l'équipe a même deux premiers blocs complets sans le moindre joueur né en Autriche. Le seul titulaire du passeport local est en effet le Belge naturalisé Seena Peeters qui s'impose de plus en plus comme un grand talent en évoluant sur la première ligne (Roy-Rockwood-Peeters).
Si le meilleur marqueur de l'ICE HL en 2022/23 Brady Shaw a été conservé (un joli coup car Innsbruck perdait généralement les étrangers qui s'y révélaient), il a en effet reculé en deuxième ligne. La raison est simple : un ailier gauche encore plus fort est arrivé. Joueur de l'année en USHL, star universitaire, Kevin Roy a joué 28 matches en NHL (6 buts) et 280 en AHL (186 points). Un CV jamais vu dans ce siècle à Innsbruck. Si ce Québécois aux mains habiles est devenu abordable, c'est parce que ses performances ont été médiocres la saison dernière en Suède comme en Finlande. Mais c'est parce qu'il avait commencé sa saison en décembre, sans avoir fait la préparation. Ayant cette fois été mis en meilleure condition physique, il fait étalage de son talent dans le Tyrol. Mais cette équipe tiendra-t-elle jusqu'en play-offs ?
Le VEU Feldkirch est poursuivi pour des irrégularités fiscales en 2019/20 et 2020/21 : le club n'aurait déclaré une petite partie des salaires et rémunéré des joueurs au noir. Les dirigeants actuels coopèrent avec les autorités, mais les dirigeants de l'époque, eux, ont fondé les Voralberg Pioneers de manière totalement indépendante juridiquement. Ceci explique peut-être cela...
Les Pioneers ont remisé leur passé sous le tapis. Ils ont fini leur période d'essai et sont donc membres à part entière de la ligue, avec plein droit de vote. L'entraîneur adepte de la trappe, Marc Habscheid, parti à Vienne, a été remplacé par son adjoint Dylan Stanley. L'attaque s'est nettement améliorée, et elle le doit surtout à homme. Après des saisons à un point par match à Cergy puis à Belfast, Steven Owre fait encore plus fort dans la ligue autrichienne puisqu'il est presque à un but par match (17 buts sur les 20 premières journées). Fort dans le slot, Owre joue centre au la deuxième ligne - qui se révèle la meilleure - avec des coéquipiers pourtant peu réputés. À gauche, l'étranger le plus "exotique" du championnat, l'international néerlandais Guus van Nes ; à l'aile droite, le jeune Julian Metzler puis l'ex-international Daniel Woger, qui a 35 ans et n'avait jamais autant engrangé de points qu'actuellement.
Mais en même temps qu'ils progressaient offensivement, les Pioneers ont régressé en défense. L'élargissement général de l'effectif n'était peut-être pas suffisant dans ce secteur atteint par des blessures. Après une préparation raccourcie par une blessure, le gardien italien Alex Caffi ne retrouve plus son étonnant niveau de la saison passée. David Madlener a réussi à s'imposer à sa place... et c'est heureux car il est tout bonnement le seul gardien autrichien de la ligue !
Comment les Vienna Capitals ont-ils pu tomber en fond de classement, une place a priori indigne de l'équipe de la capitale ? Cet effondrement d'un ancien prétendant au titre avait des signes avant-coureurs. En premier lieu, les Viennois ont des problèmes d'infrastructure. À première vue, le complexe avec trois pistes de glace dont ils disposent dans le quartier de Kagran aurait de quoi faire des envieux. Après sa rénovation, le club en a récupéré en 2009 la gestion via une filiale dédiée et s'est appliquée à en réduire de moitié les pertes d'exploitation en multipliant les sources de financement. Elle reçoit toujours une subvention de la ville - qui reste propriétaire - pour couvrir notamment les coûts énergiques.
Mais la rénovation du bâtiment n'avait pas concerné les installations frigorifiques, qui ont 30 ans. Les incidents en cours de saison dernière, qui ont privé les Capitals de glace pendant plus d'une semaine, traduisaient une vétusté avérée par des examens. Cet été, des installations mobiles ont été installées en urgence sur deux des trois pistes pour pouvoir poursuivre l'activité (tant chez les jeunes que chez les gros). Ce système s'appuie sur des tuyaux flexibles, posés par dessus la dalle de béton et non pas coulés à l'intérieur. Malheur supplémentaire, une des fixations a lâché et a conduit à arrêter un match contre Feldkirch après le premier tiers-temps. C'est dans ce contexte usant pour les nerfs de tous les dirigeants que le président Hans Schmid a annoncé vouloir se retirer. À plus de 80 ans (!), il est encore très pris par son entreprise et souhaiterait trouver un successeur, même s'il veut rester dans le club d'une manière ou d'une autre. Schmid est toujours sponsor, mais l'argent ne coule pas à flots. Cela explique notamment la suppression de l'équipe réserve qui coûtait trop cher - Vienne préfère s'appuyer sur une collaboration avec un club indépendant d'Alps HL, Zell am See.
Lorsque le nouvel entraîneur canadien Marc Habscheid s'est fait virer en octobre après une série de 8 défaites - record historique pour le club - c'est donc son assistant Christian Dolezal qui a pris le relais, avec l'aide de l'entraîneur des moins de 15 ans Fabian Scholz. Une solution interne qui est appelée à durer. Le club a déjà dû investir ailleurs pour parer au plus pressé car les alarmes s'allumaient dans tous les secteurs. Il a fallu embaucher un gardien pour deux mois (Adam Ohre) parce que le titulaire Stefan Steen était blessé et que sa doublure Sebastian Wraneschitz n'était pas sûre d'avoir le feu vert médical pour jouer les premières rencontres après la trêve de novembre.
L'international Kilian Zündel a été prêté par Ambrì jusqu'en janvier (après un bras de fer administratif avec son ancien club Salzbourg) parce que Dominique Heinrich s'est blessé. L'autre défenseur offensif Oskar Drugge a été un ratage inexplicable et a été renvoyé d'où il venait, au Danemark où il avait été champion et élu sur l'équipe-type. Bizarrement, son remplaçant est un profil totalement différent, un gros gabarit physique purement défensif, Evan Wardley. Apparemment, il n'y a plus qu'un seul mot d'ordre à Vienne, tant au-dessus qu'en dessous de la glace : colmater les brèches à tout prix !
Tom Barrasso, qui vient d'être élu au Hall of Fame de la NHL, est toujours l'entraîneur d'Asiago, et progresse avec le club italien. Après la qualification en pré-playoffs l'an passé (neuvième), il affichait comme objectif de se rapprocher du top-6 avec des lignes plus équilibrées qui dépendraient moins du premier trio. Réussir à répéter la même performance serait déjà bien.
Il ne faut pas oublier qu'Asiago est toujours en période d'essai (contrairement aux Pioneers qui ont définitivement été intégrés). Sa patinoire est censée être mise à niveau d'ici la saison prochaine. Le seul club italien d'une région absolument pas germanophone reste un peu atypique : les clubs autrichiens n'entreprennent pas avec plaisir le voyage tortueux vers cette vallée reculée de Vénétie. Sa présence a surtout des raisons politiques : c'est le club du président de la fédération italienne Andrea Gios, celui qui autorise in fine les clubs italiens à participer à la ligue autrichienne.
Gios a fait du club une sorte de camp de naturalisation de hockeyeurs nord-américains pour les Jeux olympiques de Milan et Cortina (pour lesquels l'IIHF manifeste de plus en plus fort sa désapprobation et ses doutes sur les conditions d'accueil mises en place pour le hockey sur glace). Tout comme Anthony Salinitri (parti à Graz), Giordano Finoro a été le premier à devenir sélectionnable cet été, un bloc entier le sera l'an prochain. Mais sitôt devenu officiellement italien, Finoro ne marque plus ! Le club est sans doute allé à la limite de ses possibilités pour conserver le duo qu'il forme avec le centre Allan McShane : les troisième (McShane) et sixième (Finoro) marqueurs du dernier championnat ne sont plus au même niveau et Asiago est à la peine offensivement.
En compensation, les Italiens se sont améliorés dans les cages (l'ancien poste de Barrasso). Justin Fazio a un meilleur concurrent avec Marco De Filippo, un gardien de 33 ans formé à Cortina, qui était oublié sans doute à tort en Alps Hockey League et vient d'être rappelé en équipe nationale.
Après une trop belle première saison (sixième en 2022 pour son retour), l'Olimpija Ljubljana était assez correctement parti mais n'a cessé de décliner au fil de la saison dernière. Quand tout espoir de play-offs a été perdu, le club s'est séparé de plusieurs joueurs pour faire des économies (comme il l'avait fait avant d'être exclu de ma ligue une première fois...) et l'entraîneur Mitja Sivic a fini par rendre son tablier. Le Finlandais Antti Karhula a pris sa succession, et il a réussi le seul objectif qui restait, éviter la dernière place en laissant Feldkirch derrière. On lui a donc maintenu la confiance.
Les Slovènes ont compris qu'ils risquaient de souffrir et que le poste de gardien serait crucial. L'international slovène Zan Us et sa doublure canadienne Anthony Morrone (qui venait de Mulhouse) ont tous deux fini avec le même pourcentage d'arrêts médiocre (88,4%). Aucun n'a été conservé. Le club a préféré choisir un numéro 1 indiscutable en recrutant Lukas Horak, l'ancien gardien de Grenoble et depuis deux ans de Herlev au Danemark. Très convaincant au début, il a donné de premiers signes de faiblesse... avant de se blesser. Comme sa doublure (Luka Kalin) n'a que 19 ans, il a fallu se résoudre à engager un remplaçant temporaire (Robin Rahm).
Jusqu'ici, l'Olimpija n'est donc pas vendeur. Il garde espoir pour les pré-playoffs et reste acheteur. Il vient ainsi d'engager le défenseur Charlie Dodero, qui n'avait toujours pas retrouvé de club cette saison après avoir dû quitter Rouen. L'Américain remplace avec un mois de retard son compatriote Will Cullen, qui devait être le joueur-clé du powerplay à la ligne bleue mais était reparti en ECHL. Ce fut le seul recrutement raté. Trevor Gooch semble bien être le leader sur la glace et dans le vestiaire qu'annonçait Karhula. Et à 38 ans, l'international slovène Ziga Pavlin a plus que de beaux restes, il s'est imposé comme le pilier défensif indispensable. L'Olimpija a donc encore de quoi lutter pour la qualification.
Pour sa deuxième saison de contrat à Graz, l'entraîneur suédois Johan Pannerborn, qui était déjà impliqué dans le recrutement, a reçu le titre officiel de directeur sportif. C'est lui qui a composé son effectif, en s'appuyant sur beaucoup de compatriotes assez moyens. Or, le seul Suédois qui faisait vraiment la différence, c'était le gardien Engstrand. Son successeur norvégien Lars Volden, qui assure une certaine solidité avec son grand gabarit, n'a pas la même capacité à "voler" des matches.
Avant la saison, les 99ers étaient souvent pronostiqués à la dernière place. Les prévisions se sont vérifiées... Les entraîneurs suédois n'auront rien apporté. La touche norvégienne qui avait réussi avec Viktor Granholm (meilleur marqueur parti tenter sa chance en Suède) ne s'est pas répétée avec Volden. Le club prépare déjà l'avenir et se projette vers son 25e anniversaire en 2024. À la fin du contrat de Pannerborn, il projetterait le rapatriement de Harry Lange, entraîneur autrichien qui dirige aujourd'hui Bad Nauheim en DEL2.
La saison en cours paraît en revanche mal partie. L'absence de profondeur de banc n'a pas permis de compenser les malades. L'offensive déjà faible est encore plus atone sans Granholm. Le pilier du club Ken Ograjensek (huitième saison depuis son arrivée d'Épinal en 2016) est le meilleur marqueur au vu de la faiblesse des recrues. Il n'y a pas de centre créatif, et peu de soutien offensif des défenseurs. Le motif d'espoir est l'arrivée du buteur letton Renars Krastenbergs comme joker lors de la trêve de novembre.
Marc Branchu